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Cauchemar orchestré

Le cauchemar de Füssli : romantisme noir, art fantastique

Quand on parle du fantastique en France, c’est souvent pour le minorer  et le railler ou bien pour écrire des textes savants qui cherchent à le catégoriser en faisant fi de son esthétique.

L’exposition  L’ange du bizarre : le romantisme noir de Goya à Max Ernst n’échappe pas à la règle. Les commissaires de l’exposition, soucieux d’inscrire le romantisme noir sous les auspices de la grande culture, établissent des filiations un peu forcées entre les courants artistiques. Si le mouvement pictural symboliste s’inscrit pleinement dans une dynamique noire, on ne voit pas très bien en quoi le surréalisme est l’héritier du romantisme noir. Le surréalisme ne revendique ni la morbidité des sentiments, ni la tourmente existentielle.

On peut également être surpris par certaines approximations dans les textes qui émaillent la scénographie. Ainsi, concernant les représentations artistiques de Lucifer on peut lire : « Contrairement à l’idéalisation miltonienne de Satan, Delacroix, Feuchère ou Hugo se plaisent à imaginer des Méphistos grotesques, grimaçants et velus, plus proches de la tradition populaire médiévale. » C’est l’animal qui donne au diable ses principaux traits iconiques au Moyen Âge, le Lucifer de Feuchère et le Méphisto de Delacroix qui s’offrent au regard du spectateur dans l’exposition sont loin d’être les créatures grimaçantes annoncées. Elles nous montrent au contraire un Satan bien humain en proie à la mélancolie.

Enfin, il est dommage de ne pas avoir fait mention de peintres comme Hans Baldung Grien, qui à l’époque sombre des grands procès de sorcellerie exprimaient dans leurs toiles les fantasmes liés à la figure de la sorcière.

Malgré ces réserves, je vous encourage à aller voir cette exposition qui contient quelques très belles œuvres d’ Edvard Munch, Félicien Rops ou encore Gustave Moreau.

 

L’ange du bizarre. Le romantisme noir de Goya à Max Ernst. Exposition au musée d’Orsay du 5 mars au 9 juin 2013.